Le plaisir et la relation sexuelle, sommet de la communication conjugale

Le plaisir et la relation sexuelle, sommet de la communication conjugale

L’homme est un être de plaisir (la table, le sommeil, le sport, le sexe). Le désir et le plaisir sont le moteur de la vie, mais il n’est pas suffisant et il est important de l’approfondir au niveau du cœur, de la raison, sinon l’amour reste un épicurisme émotionnel ou sentimental. Aujourd’hui les couples pensent en savoir beaucoup sur la sexualité et ont en fait besoin d’informations concernant le fonctionnement masculin et féminin et la relation sexuelle ainsi que les dysfonctionnements pouvant survenir.

Apprendre le langage charnel, lequel n’est pas que la relation sexuelle, c’est le regard – quel regard je pose sur moi et sur mon conjoint, chaque matin et soir, même quand il m’énerve, que sa parole me blesse, que je suis vexé ? Quel regard je porte sur l’autre et l’autre sur moi ? Est ce que je me sens respecté(e) debout face à lui (à elle) ? Qu’en est-il de ces gestes du quotidien, sourire, main sur l’épaule, clin d’œil, toute cette complicité qui s’installe, au fur et à mesure de la vie conjugale ?

La relation sexuelle est le plus beau langage dans un couple. La fonction plaisir implique de se livrer, recevoir, dépendre. Pour unir un couple, l’épanouir, le construire il est indispensable que chacun ait une capacité à donner et à recevoir, se reconnaître dépendant, accepte de se livrer, accepte aussi son corps comme lieu de plaisir, accepte de se laisser guider, de se découvrir dans sa féminité et sa masculinité. La sexualité n’est pas un besoin qui serait dégradation du désir et objet de la pulsion, elle est désir, c’est-à-dire centrée sur l’autre, vers l’autre. C’est aussi là que la communication est la plus difficile ou fragile. Après une infidélité, il est important qu’une décision soit prise sur la reprise des relations sexuelles : la liaison découverte a-t-elle continué ou est-elle arrêtée ? L’apaisement ne peut exister sans que la confiance ne commence à se rétablir.

Certains ont gardé vivants le désir et l’échange de plaisir au sein de leur couple. Ils vont s’ouvrir à de nouveaux jeux sexuels, pratiquer l’échangisme ou l’érotisation des situations, renouer dans cette complicité des partenaires qui osent poser de nouveaux gestes. Ainsi dans l’acte sexuel, l’homme manifeste sa puissance et dans l’éjaculation entre dans sa vulnérabilité. La femme qui était d’abord dans sa vulnérabilité dans la première phase de la relation sexuelle, entre alors dans sa puissance au moment de l’orgasme et reçoit la vulnérabilité de l’homme. Cette inversion des pôles est sans cesse en action entre l’homme et la femme et se trouve à la base de leur harmonie, ils ont à le découvrir lorsqu’ils reconstruisent leur couple. L’orgasme est l’un des endroits charnières ou l’énergie bascule chez l’un et chez l’autre. De la puissance extérieure à la vulnérabilité intérieure chez l’homme. De la vulnérabilité extérieure chez la femme à la puissance intérieure. L’homme apprend à contrôler son éjaculation, ne plus en être le « maître » et à être davantage en harmonie avec sa partenaire pour goûter le plaisir. C’est une conception libératrice, l’homme se donne, la femme reçoit et inversement. Cela demande de s’apprivoiser, de se faire connaître et de lâcher prise. Un travail sur la respiration, inspir et expir, peut être proposé pour permettre l’unité et la fusion – ainsi il y a un temps où donner et recevoir fusionnent au cours de la relation sexuelle.

La relation sexuelle n’est plus spécifique au couple et peut se réaliser en dehors d’un couple institué.  Mais elle y prendra un sens particulier. La relation sexuelle marquera un territoire, un rituel témoin de l’investissement dans l’intime. L’infidélité apparaîtra surtout comme le non-respect de cet intime, la banalisation d’un acte que le couple avait sublimé et qui n’appartenait qu’à lui seul. Cela peut donner lieu à de fortes violences. La relation sexuelle dynamise, équilibre, colore la vie conjugale et participe à l’harmonie. Elle n’est pas la roue de secours. Elle met la paix et la joie. Elle est source de vie, d’unité dans l’amour. Par sa plénitude dans le don, la tendresse, l’harmonie, le rapport conjugal aide à l’épanouissement personnel.

La relation sexuelle fait naître :

–          le bonheur d’exister pour quelqu’un,

–          la découverte que l’on peut être source de joie,

–          la confiance en soi et en l’autre,

–          l’éveil de la fibre parentale et de la coresponsabilité,

–          l’engagement à construire une unité, une communion,

–          le besoin de réflexion, de lâcher-prise, de dialogue.

Le cannibalisme amoureux ne peut-il pas aussi se révéler dans la relation intime du couple ? Nous voulons étreindre, nous avons besoin d’amour pour combler le vide qui est en nous et nous proposons de l’amour à l’autre pour mieux l’attirer vers nous. Nous sommes manipulés par notre manque et nous ne pouvons pas être des partenaires fiables en amour. Nous projetons. Ce cannibalisme métaphysique ne cessera pas, mais il peut devenir plus conscient et faire l’objet d’un dépassement pour laisser davantage la place à l’autre. La personne qui apprend à se remplir par elle-même attend moins de l’autre. En ce sens, quand elle se donne elle le fait pour le plaisir de donner. Elle reçoit déjà dans l’acte de donner.

Ainsi hommes et femmes sont appelés à coopérer dans un désir et un plaisir partagés. Etre dans un discours amoureux conquérant : « je te prends, je te pénètre, je prends mon plaisir » conduit à faire l’amour dans un état d’esprit de solitude, une masturbation déguisée. Ce sont deux solitudes qui entrent en jouissance où la femme reste passive, l’homme prenant son plaisir, mais ils ne se rejoignent pas. Et quand la femme devient désirante, pénétrante psychiquement un véritable retournement se produit dans la relation homme-femme. Les rôles sont interchangeables, ils découvrent un pôle de réceptivité qui les rend plus vulnérables.  L’homme peut gagner dans sa part de féminité pendant que la parole de la femme exprime par son désir son besoin d’aller vers lui. Pour que la femme puisse ainsi trouver place dans la relation sexuelle sans être dans le pouvoir, il est bon de rester dans une distance qui contribue au jeu du désir. Gagner en équilibre c’est évoluer entre l’actif et le réceptif, c’est développer la tendresse. C’est ainsi qu’aujourd’hui il incombe aux femmes de continuer à se dévoiler elles-mêmes, d’oser être elles-mêmes dans leur féminité et leur sensualité. Elles ont à apprendre à s’aimer elles-mêmes. Les hommes vulnérables aussi doivent se reconnaître, se redéfinir, afin de ne pas être isolés, ni surtout éloignés par la pression de performance.

La relation sexuelle est essentielle dans le couple, et pourtant la réalité peut être beaucoup plus complexe. En effet certains couples vont privilégier la relation d’amitié, les affinités intellectuelles, affectives, artistiques qui prennent de l’importance et qui apportent, permettent aussi de créer son intimité. Il s’agit là de vivre une relation qui s’approfondira dans la réalité de l’être et non pas seulement dans un recherche de jouissance. Il y a longtemps que les hommes et les femmes ont inventé l’amitié amoureuse, brûlante de désir contenu, et qui pour des raisons variées ne passe pas à l’acte et reste au stade de l’imaginaire, comme dans l’enfance ou l’adolescence, ou se sublime dans un partage intellectuel et affectif, comme dans l’amour courtois. Le couple qui cherche à reconstruire va peut-être commencer par une longue période d’abstinence.  La proximité physique, les ajustements du quotidien représentent alors toujours une épreuve dans la vie à deux et constituent une étape nécessaire pour se retrouver.

La sexualité est révélatrice d’une relation qui est malade ou en est la conséquence, mais aussi parfois le seul lien qui tient. Il peut même y avoir la perte du toucher érotisé, tendre, qui permet de rester en contact physique avec l’autre. Ce toucher rend l’autre existant et s’il disparaît, peut apparaître la solitude et parfois le désir concomitant d’aller voir ailleurs. Restaurer le toucher est essentiel pour restaurer le lien d’amour.

Parfois le conflit est une porte d’accès à la relation sexuelle, car il permet la reconnexion intérieure. La relation extraconjugale peut amener le couple à réfléchir à sa sexualité. Même dans les couples qui ont développé une bonne intimité, cette question va se poser à un moment donné et peut porter sur les différentes phases de la relation conjugale – sur la tendresse, sur les préludes, sur l’excitation, l’orgasme, sur la résolution, la parole ou l’écoute avant, pendant et après. Ainsi ces prises de conscience et ces révélations communes dans un dialogue vrai et ouvert vont doper la sexualité et permettre de retrouver une proximité bien plus enrichissante. Les couples découvrent un éros plus fort et plus profond à l’occasion d’une infidélité. Les deux personnes sont en voie d’autonomie et ne font pas reposer leur sexualité, leur plaisir que sur l’autre ; elles sont aussi en capacité d’être en accord avec leur corps et de pouvoir communiquer avec l’autre sur leurs sensations. Si le conjoint, à l’occasion d’une infidélité, révèle sa force et son goût de la vie, le couple a de grandes chances de se retrouver.

La fécondité du couple à travers cette relation sexuelle est aussi un enjeu. L’enfant, la vie sociale, pour soi et l’autre sont les manifestations de cette fécondité. Quelle place est donnée au fonctionnement naturel du corps féminin, décision d’une méthode naturelle ou de la contraception ? A l’heure de la ménopause et de la vieillesse, tabou de la sexualité qui parait être devenue inutile ? La fécondité sociale se manifeste dans l’épanouissement, le fait d’être porté vers un engagement extérieur personnellement ou en couple, source de bien être. Etre aimé donne une énergie forte. Parfois une grossesse surviendra à la suite de l’infidélité dans un nouveau projet conjugal.

La sexualité étant don et accueil, l’harmonie sexuelle est importante pour le couple. Elle contribue à son épanouissement humain et spirituel, à sa communion, mais elle n’est pas le tout de l’amour conjugal. L’acte conjugal présent ne fait pas le tout de la vie conjugale et il doit être relayé au quotidien par les gestes de tendresse, le soutien mutuel, les projets…

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