Etre Beau père ou belle mère dans une famille recomposée

Etre Beau père ou belle mère dans une famille recomposée

La famille traditionnelle reste une réalité dominante à laquelle se juxtapose depuis plusieurs années celle des familles recomposées:

« Sur les 14,1 millions d’enfants de moins de 18 ans vivant en France (hors Mayotte), 68 % vivent ainsi dans une famille dite « traditionnelle » (avec leurs deux parents et d’éventuels frères et sœurs), 21 % dans une famille monoparentale (18 % avec leur mère) – un chiffre en augmentation au fil des ans, et 11 %, enfin, dans une famille recomposée, où au moins un enfant n’est pas issu du couple. Dans cette dernière catégorie, 7 % vivent avec un parent et un beau-parent et 4 % avec leurs deux parents et des demi-sœurs ou frères. » Le monde 14 janvier 2020

Régulièrement des demandes de consultations portent sur l’entente intra- familiale. En effet pas facile de recomposer non seulement un nouveau couple mais aussi une nouvelle famille avec un ou plusieurs enfants issus d’autres unions et peut-être aussi de la nouvelle union. Les différences d’éducation, de modèle familial voient le jour de manière plus ou moins prononcée suivant l’âge des enfants, l’expérience des parents et l’entente réelle avec l’ex conjoint.

C’est le tout premier élément: quelle est l’entente avec l’ex conjoint(e) avec lequel on reste parent toute la vie? Quel est le mode de garde: exclusif, aménagé, alterné? Comment ce mode de garde est vécu par les parents et par les enfants? Ce sont les toutes premières questions à se poser quand on souhaite vivre à nouveau en couple et constituer une nouvelle entité familiale, construire un nouveau foyer. L’enfant a besoin de sentir une certaine cohérence entre chez papa et maman, qu’il garde une place privilégiée dans la vie de son parent même s’il refait sa vie et il sera sensible aux différences de traitements entre les enfants d’unions différentes. Si les parents d’origine sont clairs et ont conservé un minimum de dialogue cela aidera m’enfant à s’adapter aux changements de vie, sinon des difficultés peuvent survenir surtout comportementales et envahir alors les nouveaux foyers surtout à l’adolescence.

Une fois que ces places là sont claires, la venue d’un nouveau conjoint est facilitée, car quoiqu’on en dise non seulement l’adulte refait sa vie et doit réapprivoiser un autre au quotidien mais l’enfant aussi, un adulte qu’il n’a pas choisi, qu’il n’est pas obligé d’aimer mais qu’il doit accepter et respecter comme faisant désormais partie de son quotidien surtout s’ils vivent ensemble.

L’adaptation est dans les deux sens, de l’adulte qui doit faire le premier pas vers l’enfant puis de l’enfant vers l’adulte. Cela peut prendre beaucoup de temps et demander des aménagements relationnels où le parent aura une place de facilitateur. L’arrivée d’un nouvel enfant au foyer peut être vécue comme une chance ou comme une privation supplémentaire du parent et susciter sentiment de jalousie et trahison. De même la différence de traitements entre les enfants de lits différents montrera des failles chez les adultes dans lesquelles l’enfant ira afin de déstabiliser et trouver sa place dans le conflit, quitte à mettre à mal le couple non par désir conscient mais par difficulté à trouver sa propre place et c’est aussi parfois une façon d’exprimer sa colère ou sa tristesse dûes à la séparation de ses parents.

Le beau-parent dans tout cela? Ce n’est pas un nouveau parent, il n’a pas l’autorité parentale ni la responsabilité éducative de l’enfant (décisions, sanctions, soins….). Par contre il devient un référent adulte avec qui il partage le quotidien et donc un « vivre ensemble » dont les deux adultes ensemble et à égalité sont garants à la maison. Ainsi, il est primordial que les deux adultes se mettent d’accord sur des règles de vie commune pour que les enfants sachent ce qui se vit là ou pas, quelle est l’organisation…Tout enfant ou adolescent a besoin de sécurité et cherche souvent dans l’autorité et l’affectivité cette contenance qui lui permet de grandir et découvrir la vie dans des conditions favorables. Quand cette vie commune n’est pas ainsi régulée ou que les deux adultes montrent facilement leurs désaccords cela crée rapidement des conflits non seulement avec l’enfant mais surtout entre les conjoints. C’est là la principale plainte que l’entends: « à cause de son fils ( de sa fille) on se dispute tout le temps »…Les enfants ne sont pas la cause du conflit mais le déclencheur en soulignant ce qui n’est pas aligné chez les adultes, il y a une brèche ils s’y enfoncent.

C’est très déstabilisant. Le beau-parent peut avoir du mal à trouver sa place et à comprendre que l’enfant n’est pas forcément dans le rejet mais dans le questionnement des places, rôles et fonctions de chacun, il reprochera alors au parent de ne rien faire pour l’aider et qu’il prend partie pour son enfant. Il est bon que le beau-parent, surtout les belle-mères, ne cherchent pas à tout prix à se faire aimer, mais plutôt à ouvrir et maintenir un dialogue en confiance. S’intéresser à l’enfant, laisser du temps à l’enfant avec son parent de manière exclusive, trouver des temps de partage (jeux, cinéma…). Les deux sont des étrangers l’un pour l’autre il faut du temps et de l’espace pour apprendre à se connaître, se parler, s’entendre. Il émerge parfois une jalousie du beau-parent vis à vis de l’enfant qui prendrait sa place affectivement, cela provoque colère et sentiment d’abandon ou de rejet qui rejaillit négativement sur la relation conjugale. L’enfant peut ressentir la même chose ayant la sensation que son parent ne fait plus attention à lui. L’équilibre est difficile à trouver et reste propre à chacun. C’est le dialogue régulier entre adultes et l’écoute des besoins de l’enfant suivant son âge et sa personnalité qui aideront à le trouver.

L’enfant ne doit pas devenir une cause de conflit récurrent et encore moins de rupture conjugale, c’est la relation conjugale qui est à questionner. Parfois la place de l’enfant sera aussi à questionner et un repositionnement dans la relation adulte/enfant sera nécessaire. L’enfant doit entendre que dans la maison le beau-parent comme le parent est garant du bon fonctionnement du foyer, de l’ambiance familiale et qu’il contribue même financièrement au bien être de tous, en cela il a l’autorité comme référent de faire appliquer les règles de la vie commune et d’être pleinement actif dans les projets familiaux. Par contre c’est le parent qui prend les décisions de soins, éducative (école…) ou de sanction avec l’autre parent. Le beau-parent souvent est conseil et apporte une autre vision des choses avec un recul souvent utile.

Sans aucun doute il est bon de prendre en compte que c’est l’enfant qui est fragile, qui vit des séparations, changements affectifs qui lui sont imposés et qui le font souffrir. L’adaptabilité des enfants ne doit pas faire oublier qu’ils sont en construction et que c’est à l’adulte de le guider vers son autonomie et non à l’enfant de porter les failles adultes.

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