cheminer en couple

Cheminements des couples aujourd’hui

INTRODUCTION

Pour qualifier l’amour du couple je reprendrai une citation du philosophe Hadjadj : « aimer c’est vouloir s’unir à ce qu’on aime » on aime donc on veut le bien de l’autre, mais quel bien ? Pour y répondre il s’agit d’abord d’être dans l’accueil de l’autre afin de savoir donner à l’autre ce qui lui va vraiment, le faire devenir pleinement lui-même et créer un lien de cœur à cœur. Cela les couples veulent le construire dans l’affectivité et la sexualité. Nous allons voir par quelles étapes affectives et relationnelles chacun des membres du couple et ensemble passent,  quels sont les piliers nécessaires pour construire cette vie conjugale.

I) NAISSANCE D’UN COUPLE

1) être homme, être femme

Etre homme, être femme, être humain cela nous est donné dès la création. Notre corps sexué hormonalement et génitalement donne une identité masculine ou féminine à chacun.

L’identité s’appuie et s’ancre aussi dans la culture, le contexte sociétal, l’éducation et le milieu familial avec ses représentations stéréotypées ou non homme/femme. Surtout, elle prend effet et toutes ses dimensions dans l’altérité, la relation à l’autre différent.

La sexualité c’est une manière d’être au monde, d’agir et de dire l’amour.  Notre agir, nos paroles sont ainsi appelés à être pris dans une éthique, Les 2 identités sont ensuite clairement exprimées dans les comportements, les attitudes avec des différences inscrites dans le fonctionnement du cerveau ou par le milieu culturel…..

Eduquer les jeunes pour demain…..

Education affective et sexuelle, responsabilité de ses actes, maîtrise de soi, réfléchir, donner sens aux choix et à sa vie, croire en soi, s’aimer, s’estimer se connaitre en tant que garçon et fille. L’identité se construit aussi dans une découverte par étapes de son corps tout au long de l’enfance et de l’adolescence. L’arrivée des pulsions à l’adolescence fera naître l’attirance vers l’autre et la découverte du sentiment amoureux. Là encore en tant qu’homme ou femme cela sera vécu différemment.

Avant l’amour il y a l’amitié,  une amitié vécue avec le sexe différent ou avec son semblable et qui est déjà une manière d’être et de vivre au monde dans une relation à l’autre, d’expérimenter qu’il y a égalité et différence entre hommes et femmes. Aller vers l’autre demande des efforts, de la volonté, du temps : les fiançailles,  préparations au mariage, pacs, cohabitation pour certains…. sont ce temps mais il me semble que ce temps commence dès la naissance lorsque le petit garçon ou la petite fille va se découvrir dans sa féminité et sa masculinité au fur et à mesure de sa croissance dans le regard de ses parents, dans les relations avec les autres.

5 facteurs associés à la réussite du couple :

 

*Qualité des ressources économiques et culturelles

*Présence de modèles durant l’enfance et l’adolescence

*Bonnes conditions de l’apprentissage relationnel

*Importance des références communes

*Accent mis sur l’idéologie communautaire.

les premières étapes de la construction du mythe conjugal:

– Rencontre: La place du virtuel aujourd’hui, d’un coup de foudre ou d’une confidence. L’émotion centrale est alors « j’ai le cœur qui bat ». Ce qu’il en résulte c’est «  l’attachement »avec une place importante des hormones comme l’ocytocine et la vasopressine. Pour commencer cette histoire d’amour, l’homme et la femme vont un jour se rencontrer, se découvrir et s’apprivoiser dans leurs différences. Elle réunit deux êtres qui sont attirés l’un par l’autre. L’amour c’est cinq rêves : celui d’exister, de vivre la relation sexuelle, de donner la vie et/ou  faire des projets, de partager la tendresse, de communiquer dans la complicité et le respect.

– Idéalisation: l’autre me fait exister, je compte pour lui. Phase de fusion, pas de recul sur ce qui se vit. Grandes émotions, plaisir d’être avec l’autre. C’est aujourd’hui souvent à ce moment là qu’il y a les premières relations sexuelles et qu’après il y a parfois une blessure si cela ne dure pas.  On est tout pour l’autre et il est tout pour soi. Eloignement des amis, centration sur le Nous qui comble. Tout est parfait. L’amour est aveugle !

– Désidéalisation: l’autre ne peut pas tout combler. Les défauts, imperfections, manques émergent ou sont rendus visibles. 1ers reproches, 1ères disputes et risques de séparation que certains vont à tout prix éviter soit en quittant pour recommencer ailleurs la phase idyllique, soit par un statut quo par peur de perdre l’autre soit en décidant de faire un choix de l’autre tel qu’il est et tel que je suis.

– Prise de décision: la volonté d’accepter l’autre est d’être avec l’autre c’est-à-dire de choisir de laisser les autres qui pourraient aussi être attirant(e)s. couper les ponts. Deuils à faire. Accepter de vivre l’arrachement à tout ce qui m’empêche de construire la communauté conjugale : famille, profession, ex, lieu, habitudes de célibataire….Mettre l’autre à la première place !

Adaptation : oser partir à l’aventure, oser bouger et changer. Première période qui commence pendant les fiançailles par exemple et qui se poursuit dans les premiers temps du mariage ou dans le « vivre ensemble »de la cohabitation.  Construire l’unité: fixer les frontières, définir les buts, coordonner les actions. Rester amoureux même si à ce moment là le sentiment se transforme en amour vrai. Engagement à marcher avec l’autre, à être son compagnon de route, le soutenir, lui demander du soutien.  Dès ce moment là c’est important de prendre soin de son couple. Aujourd’hui la montée de l’individualisme se veut comme une vérité: chacun choisit sa vérité, sa morale, sa liberté. La vraie liberté est celle de pouvoir poser un choix et de prendre une décision dans sa propre volonté, avec son consentement en conscience.

2) construction du couple :

Définition du couple : Aujourd’hui c’est une relation. 2 personnes se choisissent en fonction de qualités physiques, morales, intellectuelles ou inconsciemment liées au passé de chacun. Avec relations sexuelles satisfaisantes et communication plaisantes. (Neuberger).

S’engager c’est vouloir co-naître, naître à nouveau tout le temps avec l’autre. En effet la vie de couple est une succession d’événements,d’évolutions, voire de changements, qui rendent la vie de couple sans cesse en mouvement. Dans ce cadre-là il est impossible d’être dans la banalité.

Le mariage c’est passer aussi l’amour  secret au public, S’engager c’est aussi dire à l’autre que l’on consent à une vie commune unique et limitée par une frontière autour de nous afin de découvrir l’altérité.  Enfin le mariage n’est pas l’union que de deux cœurs mais la fondation d’un couple qui est appelé lui-même à être à l’origine d’une famille socle de la société. Dès lors le couple pourra faire équipe, former un « nous », lieu de construction personnelle et conjugale pour répondre à un appel d’amour et le révéler. Fidélité et authenticité sont des valeurs encore très présentes aujourd’hui chez les couples, quand l’émotionnel et l’insatisfaction ne viennent pas pervertir la relation. Ensuite il y a un manque de conscience que la vie de couple demande un travail relationnel et souvent les couples sont surpris de devoir le faire à la suite de tensions ou fatigues.

Ce qui rend difficile aujourd’hui la construction du couple c’est souvent la peur de soi, de ne pas y arriver avec toute la performance aujourd’hui dans les mentalités, la peur de l’autre, de sa différence, de l’inconnu, de l’échec, d’être blessé ou de blesser. Le « nous » peut prendre différentes formes car chaque couple est unique.

Ingrédients nécessaires pour construire ce NOUS :

– Croire pour durer : en l’amour, en  soi d’abord et s’aimer, avoir une estime de soi, regarder loin devant, croire en l’autre même avec ses fragilités,

– Créer l’harmonie : tendresse, sexualité, communication, projets,

Volonté partagée,

– Désir, plaisir

– confiance,

– Liberté de choix et de consentement.

Puis c’est le choix de l’engagement, d’un « nous » dans la durée. Cela crée la maison couple. Elle devient supérieure à la relation, lui appartenir est essentiel et donne une identité, une petite cellule de vie réunissant 2 personnes dans un destin. Cela mélange le rationnel et l’irrationnel. Et surtout sans s’oublier soi-même.

3) la vie du couple, les étapes, les crises (ou passages)

•          Lune de miel et fusion: 1ères années avant l’arrivée des enfants. Différentes formes de vie de couples existent (fusionnel, indépendant, égocentrique, alliance, bastion…)

•          les territoires: les 5 premières années de vie commune: frontières qui se tissent. Places et rôles, répartition des tâches, relation aux familles d’origine, la vie sociale, professionnelle, engagements divers, loisirs….

* Vitesse de croisière: de 15 à 20 ans de vie commune

– difficultés à l’arrivée des enfants, scolarisation des enfants,

– mutation professionnelle ou chômage…

–  vaincre la routine

– adolescence des enfants

– crise du milieu de vie: éloignement, remise en cause, séparation, infidélité….séparation ou divorce

– vieillissement des parents

•          Vieillissement et consensus: retraite, nid vide, maladie, transmission, veuvage. Parfois divorce

III) LES COMPOSANTES INDISPENSABLES DE LA VIE DU COUPLE

 

1) le projet du couple : Désir de grandir, de faire grandir.s’engager.

IDEAL partagé ?

Discerner: pourquoi et pour quoi je me marie ou veut vivre ensemble: fuir la famille, solitude, réparer l’histoire familiale, avoir un enfant…Faire alliance, construire la vie commune, la foi….

Sujets incontournables:

Argent, sexualité, vie sociale, familles d’origine, travail, loisirs, enfant et éducation,  besoins, le pouvoir, aspirations profondes, valeurs, croyances, les piliers du mariage, différences hommes/femmes, places, religion.

Le projet c’est la vie du couple. Contenu de l’engagement, visée commune dans le mariage. Réflexion essentielle qui guidera le couple tout au long de sa vie et lui permettra de revenir à la source, de se réajuster. Il s’agit de conjuguer les projets personnels pour voir comment chacun peut être respecté dans ses désirs tout en mettant en commun pour une vie de couple et une vie de famille harmonieuse. Ces projets à court, moyen ou long terme sont à rediscuter en permanence dans un tête à tête régulier.

L’harmonie demande de rester fidèle à l’idéal et aux projets communs, d’être dans une écoute active et empathique, disponible à l’autre, prendre soin de soi, se sentir libre et laisser l’autre libre pour que chacun amène sa pierre au fur et à mesure qu’il vieillit et que ce  soit donc une œuvre commune et non l’œuvre d’un seul.

2) la communication : s’aimer et se le dire: comment?

– se donner du temps, comme prendre des rendez-vous réguliers pour se retrouver rien qu’à 2 sans enfants, sans écran, sans travail etc.

– oser dire, oser se dire. C’est apprendre à exprimer son ressenti, ce que cela représente pour moi, et pouvoir communiquer en profondeur avec l’autre sur des faits, des opinions, des émotions, des sentiments, sa spiritualité.

– écouter, comprendre au-delà des mots et du fait exprimés

– intégrer, prendre en compte ce que l’autre dit et d’où il parle : ça c’est le bouton rouge chez mon conjoint sur lequel je ne dois pas appuyer et je le mémorise et le respecte.

– Recomposer la vie conjugale, l’entre-deux, le pot commun ou le partage se fait dans l’authenticité.

Il peut y avoir des disputes et donc apprendre à gérer les conflits : cela ne peut se faire que dans le non jugement, sans essayer de prendre possession de l’autre et d’avoir du pouvoir sur lui. Sortir de la crise c’est définir un nouveau projet de couple, place et espace des conjoints dans l’espace conjugal et  familial, respecter l’évolution de l’autre et tisser une nouvelle histoire dans la continuité ensemble.

Vivre le Pardon : au-delà du don en identifiant ce qui a blessé. Exprime et témoigne de la volonté d’aimer. Faire la Paix, c’est se donner la paix et reconstruire autrement, le but est toujours le même et on adapte ensemble la trajectoire pour y arriver.

Pardonner c’est aussi vouloir la réconciliation : c’est admettre les fragilités, limites de l’autre et d’abord de soi-même. Cela demande beaucoup d’humilité, de vouloir aimer l’autre tel qu’il est, de se remettre en cause, de laisser du temps aussi à l’autre pour cheminer. C’est redire oui à l’autre à chaque fois.

3) tendresse et sexualité : don et accueil

L’harmonie sexuelle est importante pour le couple, elle contribue à son épanouissement humain et spirituel, à sa communion mais n’est pas tout de l’amour conjugal et il doit être relayé au quotidien par les gestes de tendresse, le soutien mutuel…(à apprendre parfois surtout si on en a manqué petit). Apprendre à goûter le plaisir avec l’autre, de l’autre, la fête.

Fonction plaisir: se livrer, recevoir, dépendance, jouissance.

Fonction relation: fusion, humaniser la pulsion par une maîtrise de soi. En effet c’est faire l’unité intérieure. La sexualité ne peut se vivre pleinement que dans le don et l’accueil aussi bien au niveau physiologique que comportemental. la relation sexuelle se parle avant, pendant et après.

Fonction fécondité : Si l’amour est don, la fécondité sera le don de ce don, son redoublement, son incarnation. L’enfant sera l’incarnation la plus naturelle de ce don, mais bien sûr il ne sera pas la seule. Il y a d’autres formes de fécondité : sociale, spirituelle, professionnelle, interpersonnelle, communautaire, ecclésiale etc. Cela induit aussi  décision d’une méthode naturelle ou de la contraception pour réguler les naissances.

—        Le désir, le plaisir.

L’homme est un être de plaisir (la table, le sommeil, le sport, le sexe) le plaisir est le moteur de la vie mais il n’est pas suffisant et il est important de l’approfondir au niveau du coeur, de la raison, sinon l’amour reste émotionnel ou sentimental.

Désir : Il naît du manque, de la frustration, de la crainte. Mise en tension intérieure qui attend d’être soulagée. Vouloir vivre et partager un plaisir avec l’autre : sortir, se balader….. naît de la sensualité.

La sexualité n’est pas un instinct mais un acquis, elle s’apprend. Dialogue, création…..Mélange de deux intimités.

—        La relation sexuelle

La relation sexuelle fait naître:

–          le bonheur d’exister pour quelqu’un

–          découverte que l’on peut être source de joie

–          Confiance en soi et en l’autre

–          Éveil de la fibre parentale et de la coresponsabilité

–          Engagement à construire une unité, communion

–          Le besoin de réflexion, de lâcher prise, de dialogue

Écueils : refus ou accumulation du plaisir

Se servir de l’autre ou le fuir

Être dans la fusion totale

Réduire à la reproduction (place de la contraception, PFN)

Maladies diverses

* La chasteté:

– Respect de l’autre dans sa différence et dans son droit à être lui-même même dans son fonctionnement

– renoncer à la toute-puissance sur l’autre, ne pas le posséder, être à une juste distance

– respect du consentement de l’autre

– droit à dire non, attentes, c’est le sens du don oblatif

CONCLUSION

la vie de couple est difficile mais belle, elle demande l’implication de chacun tout en tenant compte des décalages dans les cheminements personnels dans la vie. c’est une belle aventure source de joie mais aussi de souffrance, comme pour escalader une montagne, on souffre avant de goûter la satisfaction de l’effort qui est dépassement de soi.

Un couple ne doit pas rester seul en cas de crise, et donc doit savoir humblement se tourner vers l’extérieur pour demander du soutien, la famille, les amis, un professionnel, un prêtre ou religieux, vers Dieu pour les croyants.

 

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